C'était le temps des vacances la semaine dernière. Et même si on
ne fait rien de spécial, avoir juste des journées sans planning et sans
horaires, c'est comme un petit coin de paradis. C'est le moment de terminer une
lecture qui devient de plus en plus prenante au fil des pages (La scène des
souvenirs de Kate Morton). C'est aussi l'occasion de commencer plusieurs
lectures en même temps, parce que c'est ainsi qu'elles nous viennent (Ces
instants-là de Herbjorg Wassmo et Pourquoi pas ? De David Nicholls).
C'était aussi ce genre de semaine, où je ne fais pas spécialement
d'effort. J'ai eu ma période make-up quand il y a eu le gros boom des
youtubeuse beauté. Je voyais ces tutos de dingues, et je voulais des dégradés sur
mes paupières. Avec le temps, et la prise de conscience écologique aussi, je
termine mes produits sans les racheter. J'ai appris à comprendre ma peau.
Et des semaines comme la semaine dernière, c'est le moment idéal
pour faire une pause, et ne rien mettre. Pas de mascara. Pas de rouge à lèvres.
Pas de fard. Pas d'anticernes. Même pas de poudre. Vous pouvez me dire que de
votre côté c'est quelque chose qui ne vous prend plus la tête depuis longtemps,
voire même que vous n'avez jamais été une adepte du maquillage. De mon côté, je
n'ai aucune gêne à avouer que ça ne fait pas si longtemps que ça que j'ai
arrêté de me lisser les cheveux tous les matins, parce que les ondulations
naturelles n'allaient jamais dans mon sens. Ça ne fait pas si longtemps que
j'ose sortir sans aucune trace de maquillage sur le visage. Des jours je n'en
ai pas envie, ni besoin, car le visage dans le miroir me va ainsi. D'autres
matins, c'est l'hécatombe, et je ne rêve que d'une chose, une grosse gomme pour
tout effacer et recommencer. Et d'autres encore, j'ai juste envie. Envie de
vert et de doré sur mes yeux. Envie de lèvres foncées et pétantes. Envie d'un
trait de liner. Etc.
Le samedi de cette fameuse semaine, je me suis rendue à
l'anniversaire d'un membre de ma famille. En mode pratique, bonne chaussure
(courir après une enfant de 2 ans toute une soirée est un sport olympique), et
pull confort. Une fois sur place je salue beaucoup de gens de mon âge, qui me
sont totalement inconnus. Des jeunes femmes d'une trentaine d'années à peine,
parfois jeune maman, comme moi. Alors qu'à mes yeux elles ressemblent à des dames
(celles dont tu as souvenir quand tu étais enfant, qui avaient un peu plus de
la vingtaine et te semblaient si graaaandes), je me reflète dans les leurs
comme une ado. C'est le genre d'instant, assez banal finalement, qui me remet
totalement en question, où je me dis que je ne fais pas assez « mon
âge ». Un de mes traits de caractère est celui du caméléon. Il peut être
très pratique et très embêtant. Adolescente déjà j'aimais me calquer énormément
sur les autres. Pratique, car je m'adaptais aux personnalités des autres
rapidement. Moins cool, il m'a été très difficile pour moi de me trouver, ayant
toujours cette sensation de « copier » les autres. Ça faisait
longtemps que je n'avais pas eu ce ressenti, et ce sont parfois les situations
les plus anodines qui font remonter de drôles de souvenirs. Une personne
populaire à l'école, alors qu'on était invisible. Des groupes d'amis, alors
qu'on est seule.
(margaudliseuse sur Instagram)
En rentrant j'ai repensé à tout ça. Je me suis regardée dans le
miroir, j'ai essayé de m'imaginer dans les yeux de ma fille, dans les yeux de
l'homme que j'aime, dans ceux des gens autour de moi que j'apprécie, et
finalement j'ai relativisé. Un style n'est qu'un style. On se rattache beaucoup
à nos vêtements. On aime ou non accorder les pièces, et des fois moins on fait
d'effort plus l’image en retour est meilleur. Car on l'aura fait sans se préoccuper du
regard des autres sur nous. On aura donc encore plus d'assurance. Des fois
c'est l'inverse. Mais l'effort mit dans une tenue va forcément nous faire
regarder ce que les autres peuvent bien voir de nous. Un vêtement, un
maquillage ou une coiffure peuvent agir comme une carapace, un mode de
protection, ou comme une parure, un mode de séduction. Le lendemain de cette soirée, j'ai repris confiance, j'ai mis les
mêmes vêtements et plutôt que de me voir comme une éternelle ado mal dans sa
peau, je me suis trouvée bien, à l'aise et confiante.
Difficile de toujours se sentir soit. Le personnage de Dorothy
dans La scène des souvenirs de Kate Morton, justement, est un peu comme ça.
Elle veut absolument être amie avec Vivien, qui représente tout ce qu'elle
admire. Vivien est une femme belle, riche, au grand coeur et mariée à un auteur
célèbre. Dorothy est une jeune femme orpheline à cause de la guerre, qui masse
les pieds d'une vieille aristocrate chaque jour. Elle aime rêver à une vie
différente, et compte bien s'enfuir avec Jimmy, l'amour de sa vie.
Des années plus tard elle a fondé une famille, et vit heureuse, à
la campagne. Le jour des 2 ans de son fils, elle va pourtant commettre
l'impensable, sous les yeux de sa fille aînée Laurel. Cette dernière fera comme
si cette scène n'avait jamais existé, jusqu'au jour de ses 70 ans, où sa mère
mourante, laisse glisser une photo d'elle et une autre femme, d'un livre. C'est
le début d'une véritable chasse au trésor, la chasse du passé de sa mère. Qui
était Dorothy avant de marier leur père ? Et surtout qui était vraiment
Vivien Jenkins ?
Il me restait plus que celui-ci avant La prisonnière du temps, qui
sort le 4 avril. C'était mon dernier Kate Morton, et j'avais même quelques
préjugés. J'ai avancé doucement, arpentant les salles de bibliothèque avec
Laurel, et évitant les bombes avec Dorothy. Au départ je ne m'attachais à
personne, et surtout pas aux personnages principaux. Dorothy me donnait la
sensation d'une femme avare et vénale, prête à tout pour gagner assez d'argent
et partir de Londres, tout même le pire. J'étais tellement préoccupée par ce
personnage distant, que je n'ai pas vu venir la révélation finale. Elle m'a
sauté à la figure, sans que je ne comprenne rien, et m'a laissé sur le… tu vois
quoi. C'était pas super original, mais c'était surtout bien amené. L'autrice te
fait penser à tout autre chose pendant 400 pages, et quand les 76 dernières
arrivent, tu t'arrêtes de respirer.
Je ne fais que vous recommander cette autrice si vous aimez les
secrets de famille, La scène des souvenirs, fait partie de ses meilleurs pour
moi.
Et comme ça tombe bien, ces personnages vont plutôt bien avec le
thème abordé plus haut. La vie est bien faite non ? Je vous aime,
aimez-vous.