Auteur : Karine Giebel
Edition : Fleuve noir
Collection : Thriller
Parution : 8 mars 2012
Pages : 500
Tu te croyais forte. Invincible. Installée sur ton piédestal, tu
imaginais pouvoir régenter le monde.
Tu manipules ? Tu deviendras une proie.
Tu domines ? Tu deviendras une esclave.
Tu mènes une vie normale, banale, plutôt enviable. Tu as su t'imposer dans ce
monde, y trouver ta place.
Et puis un jour...
Un jour, tu te retournes et tu vois une ombre derrière toi.
À partir de ce jour-là, elle te poursuit. Sans relâche.
Juste une ombre.
Sans visage, sans nom, sans mobile déclaré.
On te suit dans la rue, on ouvre ton courrier, on ferme tes fenêtres.
On t'observe jusque dans les moments les plus intimes.
Les flics te conseillent d'aller consulter un psychiatre. Tes amis s'écartent
de toi.
Personne ne te comprend, personne ne peut t'aider. Tu es seule.
Et l'ombre est toujours là. Dans ta vie, dans ton dos.
Ou seulement dans ta tête ?
Le temps que tu comprennes, il sera peut-être trop tard...
Mon avis
Karine Giebel a su conquérir son public, moi également. Son talent pour savoir exactement ou il faut appuyer pour faire mal ne laisse personne indifférent, et ses livres sont en général addictifs. Maîtresse incontestée du genre, Karine Giebel est une pro pour nous laisser croire tout et n'import quoi jusqu'aux dernières lignes.
Avec Juste une ombre, elle nous prouve, encore une fois, qu'elle sait exactement ou elle mène ses lecteurs, qu'elle arrive sans encombres à les perdre pour mieux les surprendre. Pourtant, ici, le pari n'était pas gagné d'avance, car l'histoire peine à se mettre en place, prend trop de temps pour se poser, et les détails affluent de tout côtés, sans grande importance. Jusqu'aux 150 premières pages, le roman patine, les personnages s'embourbent dans leur routine qui ne nous intéresse pas. Mais ou se cache le suspens que nous avions aimé - voir même adoré - de Morsures de l'ombre ?
Cloé est donc le personnage principale, on l'apprécie autant qu'on la déteste. Hautaine, snob, reine de son royaume, elle agace plus qu'elle ne plait. On lui trouve malgré ça beaucoup de qualités, comme étant une femme forte et sure d'elle, qui ne se laisse pas diriger par un univers d'hommes. Et pourtant elle porte le mauvais rôle, trop mauvais selon moi, celui de la femme castratrice qui ne se gêne pas de rabaisser pour mieux régner. De démolir pour grandir. Un peu plus d'humanité lui aurait valu le prix du meilleure rôle féminin, qui reste indécerné depuis belle lurette ! Il est difficile de la prendre en pitié quand l'Ombre commence à la harceler, on pourrait presque lui souhaité qu'Elle aille jusqu'au bout. Qu'Elle l'anéantisse. Mais Cloé reste une personne, avec des défauts, mais également un passé lourd a porter, impossible donc de lui vouloir tant de mal trop longtemps. Au final elle nous impressionne comme elle nous insupporte.
Et puis bien sur, on retrouve le personnage parallèle, comme toujours avec Giebel : le commandant Alexandre Gomez, le stéréotype du flic déchu. Encore en service mais plus pour très longtemps, enchaînant conneries sur connerie et détruit par la vie. Moins de clichés au dessus de sa tête et il serait directement sortit du lot, à croire que ces flics sont tous pareils, mais c'est bien connu, ce cher Monsieur Gomez aurait été décrit comme étant quelqu'un sans histoire et banal qu'on aurait réussit à lui casser du sucre sur le dos pour manque d’originalité. Le renouveau n'existe-t-il plus pour les personnages de policiers ? Malgré ce caractère déjà vu et revu, Gomez reste un personnage attachant et fort, qui ne mâche pas ses mots, pour notre plus grand plaisir, qui oublie carrément de tourner sa langue sept fois dans sa bouche avant de l'ouvrir et se contre fiche de ce que pensent les gens.
Mais face à cette Ombre, lequel de nos deux protagonistes sera le plus fort ? Le plus résistant ? Car même s'ils nous intéressent beaucoup, c'est surtout elle qui mène le bal, qui fait tournoyer nos deux héros, qui leur en fait voir de toutes les couleurs. Les perdant dans leur propre folie, dans leur propre peur. Avouons qu'elle sauve tout le roman, avec son invincibilité et ses tours de passe-passe, car les autres personnages auraient mérité une plus belle part de descriptions, même s'ils sont secondaires, mais n'ont pas gagné à la loterie des caractères, ils restent tous assez banals et peu étudiés.
Mais alors si les personnages ne sont pas si top que ça, que reste-t-il pour que ce soit un bon thriller psychologique? Tout le reste bon sang! La fameuse petite étincelle qui fait briller Morsures de l'ombre est à nouveau présente, celle qui avait tant manqué dans Chiens de sang et Jusqu'à ce que la mort nous unisse, deux de ses précédents romans qui, admettons le, ne souffrirons pas trop si on ne s'y attarde pas. Cette atmosphère de plus en plus oppressante, cette manière de nous perdre entre le vrai et le faux, ce talent de mettre le visage de n'import quels personnages sous la capuche de l'Ombre harceleuse. Tout le monde devient suspect, la victime elle-même est soupçonnée.
Un mot pour la fin et sur la fin, qui n'est qu'une porte ouverte vers une éventuelle suite, mais Karine Giebel ne fait jamais de suite. Il faudra donc l'inventer nous-même, tout en sachant quelle est inutile. Mais impossible de ne pas espérer encore, de croire que tant de douleur peut enfin être stoppé.