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jeudi 27 septembre 2018

Les enfants de coeur


C’était le titre imprévu de la rentrée. Celui qui m’a fait de l’œil, alors que je n’en avais pas entendu parler. Après lecture du résumé, ces personnages me poursuivaient déjà.

"Rose et Pierrot sont arrivés en même temps à l’orphelinat. Bébés non désirés, ou impossibles à garder. Nous sommes en 1914 et des bouches à nourrir, il y en a bien assez. En grandissant, ils se trouvent des affinités et des points communs. Les religieuses sont formelles, si ces deux-là traînent trop ensemble, ils seront perdus ! Chacun y met du sien pour séparer les deux enfants, mais quand un lien se crée, difficile de le rompre."

Au départ, j’avais de la peine avec la plume de l’autrice. Je n’aimais pas les détails crus et sexuels qu’elle utilisait. C’est un texte brut, qui n’y va pas de main morte avec ses personnages. Que ce soit Rose ou Pierrot, chacun va découvrir la vie, comme personne ne devrait la découvrir. L’un va décoller pour mieux tomber, l’autre va se ratatiner la face sur le bitume avant de gravir les échelons.
Au fil de ma lecture, j’ai commencé à m’attacher à ces deux enfants éternels. Finalement, le style a fini par passer tout seul, et je trouvais même qu’il collait bien à l’univers. On arpente des rues sombres et inquiétantes, les lieux, s’ils ne sont pas luxueux, sont au contraire très sales et miteux.

Rose est une fille ni jolie ni vilaine, comme on dirait. Si elle n’avait pas cette imagination débordante, et un don pour le spectacle, elle passerait inaperçue. J’ai aimé ce personnage, bien que des facettes de sa personnalité me soient totalement passées à côté. Son côté espiègle complète parfaitement sa tendance à saisir les opportunités quand elles se présentent. Si quelque chose ne fonctionne pas, elle le contournera jusqu’à y parvenir.
Pierrot est sa face B. Prodige du piano, il se retrouve sans un sou du jour au lendemain, et va rapidement tomber dans la spirale infernale de la drogue. Jouer pour gagner, gagner pour consommer. Je l’ai malheureusement trouvé plus effacé que Rose. Je n’arrivais pas à me sentir proche de lui, pourtant il est attachant et touchant.

Rose et Pierrot baignent dans un monde provocant. Chacun va développer rapidement, et durant l’enfance, une certaine vision de la vie sexuelle. Au départ, ils la découvrent de façon brutale, et très vite cette vision sera la leur, sans qu’on leur laisse le choix. J’ai été particulièrement touchée par cet apprentissage. Les relations sexuelles sont souvent des instants importants et sacrés, dans la vie. Sujet sensible et tabou, l’autrice dévoile ici des pensées et des actes intimes. Plus on avance dans le texte, plus on s’y fait. Plus on comprend leur vision de ces moments. On y parle aussi de maternité, d’enfants non désirés, avortés ou encore perdus.

À côté de ça, il y a les spectacles et la musique. Les passions des deux protagonistes. Ce qui les pousse à se lever chaque matin, à gagner un peu d’argent par-ci par-là. Prouver qui ils sont et qui ils peuvent devenir. Malgré les bâtons dans les roues, ou la drogue, ou les mensonges. Tomber pour mieux se relever, telle est leur devise. Si leur milieu est crade, tant pis, ils feront avec.

Ce roman est une ode à la vie. Il nous pousse à croire en nos rêves. Ne jamais laisser tomber, et toujours aller de l’avant. Rien n’a été facile pour Rose et Pierrot, pourtant ils ne lâchent rien, et leurs faiblesses deviennent rapidement leurs forces.




Auteur : Heather O'Neill
Éditeur : Seuil
Collection : Cadre vert
Parution : 16 août 2018
Pages : 475

mardi 25 septembre 2018

Le bruit du dégel


Toujours dans les romans de cette rentrée, Le bruit du dégel avait tout pour me plaire. Une couverture copiée/collée sur celle de Café Givré (idéal pour un Cold Winter Challenge d’ailleurs), et des histoires dans une histoire.

"Jean, une vieille femme seule dans sa grande maison, met Kate, une inconnue venue frapper à sa porte pour une étude, au défi d’arrêter de boire du jour au lendemain. Si Kate reste sobre durant cinq jours, Jean lui racontera son histoire. Un peu étonnée par cette demande, Kate décide de jouer le jeu, car cette vieille femme en train de couper du bois, seule dans sa maison, l’intrigue. Les jours vont se succéder et les histoires aussi, sont-elles toutes vraies, ça… c’est une autre paire de manches."

Ce livre est envoûtant. Le titre est une belle métaphore sur le temps qu’il faut pour se remettre à vivre. Le dégel est une mélodie lente qui enchante, qui libère les corps et les esprits. Kate va succomber aux chants des sirènes, et aux histoires de Jean. De jour en jour, sa sobriété va lui révéler la vie comme elle l’est vraiment. Les réactions de Laurits, son colocataire/amant, et ses propres centres d’intérêt qu’elle avait laissés de côté pour adhérer à ceux de Laurits. Kate est durant une bonne partie du roman un personnage passif. Elle écoute, et constate les effets de ces histoires sur elle. Sa passivité va évoluer jusqu’à s’effacer complètement. Elle est comme une chenille dans sa chrysalide, et le papillon qui en sort enfin. Le cheminement de ce personnage m’a beaucoup plu. Et son avancée est très douce, rien de brusque. L’auteur la laisse aller à son rythme.

Jean est ambiguë. On sait qu’elle ne raconte pas tout, qu’elle oublie volontairement certains détails. Ses histoires sont celles de sa vie, de celles de ses proches et toutes les conséquences qu’elles auront sur elle. Je vous disais dans la chronique sur Nous, les vivants, que je n’avais pas accroché au message philosophique du roman. On retrouve, pour moi, un peu le même genre de message, mais mis en avant de façon radicalement différente. Jean interprète la sage, et Kate la disciple qui écoute et apprend. John Burnside s’y prend mieux, avec beaucoup de délicatesse.

Sa plume est tendre, malgré les scènes parfois difficiles et les prises de conscience de ses personnages. Il arrive à dégager des atmosphères différentes selon les lieux du roman. La maison de Jean était pour moi l'emblème même du cosy. J’y voyais des fauteuils avec de gros coussins, des pâtisseries, et beaucoup de thé. J’avais envie de voir une maison douillette, pour cette femme à la vie cabossée. Un endroit accueillant, dans lequel Kate vient se réfugier avec plaisir. Vient apprendre et désapprendre.
Au contraire de la chambre de Kate qui est blanche, et froide. Là aussi, j’y voyais une ressemblance avec l’esprit de son occupante. Une page vierge, sur laquelle les gens écrivent leurs propres histoires, sans lui laisser le temps d’écrire la sienne.

C’est un beau roman, avec de la sagesse et de la philosophie, enrobées dans des histoires de vies parfois simples et parfois torturées.  


Auteur : John Burnside
Éditeur : Métailié
Collection : Bibliothèque Écossaise
Parution : 23 août 2018
Pages : 361


dimanche 2 septembre 2018

Nous, les vivants


La couverture du roman d’Olivier Bleys m’aura à moitié trompée. Il y aura bien de la neige et une cabane isolée, perdue au milieu des Andes. Malheureusement, le message du roman est bien trop éloigné de mes propres croyances pour que j’y adhère.

" Jonas est pilote d’hélicoptère. Alors qu’il est en mission de ravitaillement, son hélico est pris dans la neige, impossible pour lui de décoller et de rentrer. Dans la cabane, il fait la rencontre de Jésus, un garde-frontière qui va lui tenir un étrange discours… "

Est-ce que je suis partie dans l’idée que ça allait être une sorte de roman initiatique ? Complètement. Est-ce que le roman initiatique a pris un tout autre chemin que celui attendu? Encore gagné. Malheureusement, à partir du moment où j’ai compris où allait l’auteur, je me suis refermée comme une huître. Impossible de croire ou d’aimer son histoire.

À côté de ça, outre le message, j’aurais pu apprécier le reste, sauf que là aussi, bide complet. Les dialogues tombaient à plat, étaient pour moi dénués de sens et ne me parlaient absolument pas. Finalement l'histoire n'est pas dérangeante, mais elle est amenée de manière trop simple. L'auteur aurait pu oser beaucoup plus de choses, entraîner le lecteur à travers les méandres de l’irréel. Mais non.  L’aventure tourne rapidement en rond et la chute de l’intrigue est évidente.


Auteur : Olivier Bleys
Éditeur : Albin Michel
Collection : Romans français
Parution : 22 août 2018
Pages : 179



jeudi 30 août 2018

Pleurer des rivières


Suite de ma rentrée littéraire, j’ai foncé vers ce roman publié chez Héloïse d’Ormesson, au titre poétique. Le résumé ne me branchait pas plus que ça, et pourtant, ce fut une très bonne lecture.

" Meriem attend son huitième enfant à 28 ans. Treize ans de mariage avec son mari Franck, et des grossesses dont elle ne veut plus vraiment. Dans leurs traditions et croyances gitanes, l’avortement est très mal perçu, et les méthodes contraceptives ont toutes été abandonnées, car soit trop contraignantes, soit inconfortables. "

La plume est vive et piquante. L’auteur n'hésite pas à détruire des clichés dont les auteurs masculins ont tendance à abreuver leurs romans. Il vogue d’un personnage à un autre avec facilité sans pour autant perdre le lecteur, ce qui donne un récit rapide mais pas saccadé, au rythme agréable. On ne se perd pas dans les descriptions indigestes, l'essentiel est là et permet d’avancer.

Ce qui m’a vraiment plu dans ce roman, c'est sa thématique qui nous fait nous poser la question : que choisir entre l'éthique et la loi ? Dans quel camp se situer quand le cœur et la raison se chamaillent ? Quand on est mère, ce roman nous touche peut-être encore plus, mais qu’importe notre envie de maternité ou non, il ne nous laisse pas insensibles.
Les personnages ne sont pas forcément attachants, chacun possède ses bons et ses mauvais côtés, mais tous ont leurs idées et s’y tiennent. J’aime les personnages qui en veulent et qui n’attendent pas que les choses se passent. Alors que le résumé et le début du roman laissent beaucoup de place aux personnages masculins, on découvre au fil de la lecture que les femmes sont en fait le cœur, l’âme et la tête de cette histoire. J’ai été agréablement surprise par le ton que l’auteur leur donne. On ajoute à ça une prise de conscience très intéressante sur un sujet plutôt tabou, et ça nous donne un excellent livre.

Mériem et Séverine ont des vies radicalement différentes. Alors que l'une est à la maison pour élever les enfants, l'autre est autrice d'albums jeunesse et épouse d'avocat. Alors que l'une attend un nouvel enfant, l'autre peine à tomber enceinte. Ensemble elles vont apprendre à connaître la vie de l'autre et à l'envier. Chacune apporte un peu de magie à l'autre.  

Je le recommande vivement pour ceux qui ont envie de voir autre chose, qui n’aiment pas la littérature blanche contemporaine qui parfois est un peu pompeuse. C’est un texte cru et poignant. Coup de coeur bien mérité. Ce roman se lit en quelques heures, car une fois commencé impossible de le lâcher. Les personnages nous fascinent et on veut savoir jusqu'où ils vont aller. 


Auteur : Alain Jaspard
Éditeur : Héloïse d’Ormesson
Collection : -
Parution : 23 août 2018
Pages : 190



lundi 27 août 2018

Manuel de survie à l'usage des jeunes filles


La rentrée littéraire est arrivée ! Chaque année, c'est le même battage médiatique autour, mais cette fois, pas d’autre choix que de m’y intéresser un peu. Depuis janvier, ce rayon me revient à 50 % avec ma binôme. C'est un nouveau challenge qui me plaît.
Quand les premières épreuves de la rentrée sont arrivées, j’ai fait ma petite sélection et l’un de mes premiers choix s’est porté vers ce titre à rallonge, et à la couverture enneigée (ô surprise).

Première constatation, c'est que le titre anglais est très court, alors que la version française n’a rien à voir. En anglais, le surnom du personnage principal suffit, et n’aurait peut-être pas été assez clair pour le lectorat francophone.
Le style de l’auteur est assez contemplatif, et même si j’ai apprécié ma lecture dans l’ensemble, quelques paragraphes ont été sautés pour aller au cœur du roman. La narration se fait à travers le personnage de Sal, qui décrit chacune de ses actions. Si au début j’ai trouvé ça sympa, au bout de 100 pages, j’avais envie qu’elle accélère un peu. Pourtant, la raison de leur nouvelle vie en pleine nature m’a beaucoup touchée. J’étais aussi très impressionnée par toutes les connaissances concernant la survie emmagasinées par Sal.

" Elle est le personnage enfant qui a dû grandir trop vite pour le bien de sa petite sœur. Sa mère est une alcoolique sans le sou, dont le nouveau copain abuse facilement et avec plaisir de sa fille. Pour éviter le même sort à sa sœur, Sal met tout en œuvre pour partir et vivre librement. Leur venue dans la forêt est planifiée depuis des mois. "

Sal m’a fait penser à une mini Dexter par moment, dont les émotions ont été coupées. Son esprit est pratique, et rarement dans l'émotionnel. Ce qui la rend attachante par moment, car on se souvient pourquoi elle est là et tout ce qu’elle a traversé, mais elle est aussi très distante par sa rudesse.
Peppa est l'exact inverse. C'est une petite fille pleine d’imagination, avec un débit de parole important. Au grand malheur de sa sœur, elle ouvre la bouche souvent trop rapidement. Les deux forment un duo improbable et complémentaire.
J’ai eu un peu de peine à croire à la facilité avec laquelle elles vivent dans les bois. Ce sont des enfants de 10 et 13 ans, et tout ce qu’a appris Sal se trouve sur YouTube ou les émissions de Bear Grylls. Voir et faire sont deux choses différentes, et dans sa globalité, tout se passe très bien, peut-être trop bien pour que ça soit vraiment réaliste et plausible.

Pour moi, le bémol de cette lecture, c’est le rythme. Il est un peu lent, et l’auteur s’arrête sur une quantité impressionnante de détails. Pourtant, les récits dans le récit sont intéressants, et même très plaisants à découvrir, sans pour autant faire de l’ombre à l’aventure des deux sœurs.
J’ai été par contre ravie de découvrir les décors de la forêt écossaise. Je cherchais de la neige et du froid, j’ai été servie. Là où le style colle parfaitement, c’est avec les moments de silence dans les bois. Ces passages étaient très beaux, avec une petite touche de sagesse enfantine très agréable.


Auteur : Mick Kitson
Éditeur : Métailié
Collection : Bibliothèque écossaise
Parution : 30 août 2018
Pages : 240



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